Lettre ouverte à Mesdames et Messieurs les élu-e-s du Bassin d’Arcachon

Depuis deux mois, nous subissons des débordements d’eaux usées qui viennent polluer les eaux du Bassin, avec les conséquences funestes que l’on connaît sur la salubrité des coquillages. La cause de ces débordements est clairement identifiée : c’est la saturation du réseau d’assainissement des eaux usées par l’introduction massive des eaux de pluie dans les nombreuses zones de notre territoire qui se retrouvent rapidement inondées en période d’intempéries. Ce phénomène est malheureusement trop récurrent pour qu’on puisse le qualifier d’exceptionnel, ce qui pose question sur la politique menée en matière de gestion des eaux pluviales. Si des efforts sont menés sur ce sujet depuis quelques années, les résultats sont mauvais et bien loin de protéger le territoire d’un évènement de période de retour de 30 ans comme annoncé dans l’ambition que vous affichez et que mérite notre territoire.

Il est de votre responsabilité de revoir votre politique en la matière. Parmi les erreurs à corriger il en est une, grave et lourde de conséquences : celle d’attendre de l’infiltration à la parcelle une efficacité sans faille pour retenir les eaux de pluies sur place, en tous temps et en tous lieux. Il est en effet regrettable que la prescription stipulant « le volume à stocker ou le fond du système d’infiltration doit être aménagé de sorte à être au-dessus du toit du niveau haut de la nappe » soit méconnue et inappliquée, alors qu’elle figure pourtant explicitement dans le schéma directeur de gestion des eaux pluviales. La conséquence est qu’en période de nappe haute les eaux de pluie ne peuvent évidemment pas être retenues sur les parcelles et rejoignent instantanément le réseau pluvial. Or ce dernier n’est ni conçu ni dimensionné pour les évacuer, provoquant inondations et saturation du réseau d’eaux usées. Ces problèmes sont en outre aggravés par une autre erreur d’aménagement fréquemment commise, la suppression de crastes et fossés, qui outre l’évacuation, assurent également drainage, stockage, épuration et évapotranspiration, et qui sont remplacés par des canalisations incapables d’assurer les mêmes fonctions régulatrices.

C’est là un point stratégique dans l’aménagement du territoire que vous devez sérieusement revoir, en le plaçant en tête de vos priorités, vous qui êtes les responsables que nous avons élus pour la bonne gestion et la préservation de notre si beau patrimoine.

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Débordements du réseau d’assainissement des eaux usées du Bassin d’Arcachon et intempéries

Le réseau d’assainissement des eaux usées du Bassin d’Arcachon est conçu pour éviter tout rejet dans le Bassin. Les stations de pompage disposent de pompes de secours, et des bassins de stockage d’eau usée (avec fond étanche) et d’eau traitée, implantés le long des collecteurs principaux, peuvent stocker les effluents pendant quelques jours si nécessaire, ce qui permet généralement de faire face aux opérations de maintenance et aux incidents techniques sans que cela ne génère aucun rejet dans le Bassin.

Pour plus d’informations, voir sur le site du SIBA la description du réseau dans « Pôle assainissement » et les rapports annuels SIBA et délégataires dans « Vie du SIBA ».

Mais les intempéries provoquent des dysfonctionnements, essentiellement par entrée d’eaux parasites qui viennent augmenter, parfois très significativement, les débits transitant par le réseau des eaux usées et traités par les stations d’épuration. Les débits d’eau pluviale ainsi introduits peuvent être très supérieurs au débit d’eau usée et cette augmentation brutale provoque alors la saturation des installations, générant débordements du réseau et défauts de traitement des stations.

Sur le plan technique

On peut classer les entrées d’eaux parasites en deux grandes catégories :

  1. Celles résultant de défauts du réseau public (casses ou joints non étanches sur collecteurs enterrés ou sur regards générant des infiltrations d’eau de la nappe phréatique ; erreurs de raccordement entre réseau d’eaux usées et réseau d’eaux pluviales) ou de défauts sur les installations intérieures des usagers (même types de défauts, plus le raccordement de descentes de gouttières).
  2. Celles résultant d’une submersion des ouvrages d’accès au réseau (tampons des regards de visite du réseau et des boîtes de branchement du réseau public et des réseaux privés), que ce soit une submersion marine (très hautes mers, zones portuaires ou proches du littoral), ou par inondation, le plus souvent par débordement de la nappe phréatique suite à d’intenses précipitations.

En termes de conséquence, les cas de la première catégorie ont un impact significatif sur l’exploitation du service (surcoûts d’exploitation et mobilisation de moyens dédiés à leur traitement), mais ils ne provoquent généralement pas de débordement ou de dégradation de la qualité du rejet. L’exploitant met d’ailleurs en œuvre, comme c’est prévu par la réglementation, des programmes de vérification, de recherche et de correction des défauts, tant sur le réseau public que sur les installations des usagers, et doit rendre compte de la réalisation de ces programmes et de leur efficacité.

Par contre, l’introduction d’eaux parasite par submersion des ouvrages, notamment en cas d’inondation, a d’une part des conséquences beaucoup plus graves, car les débits introduits sont alors beaucoup plus importants et saturent rapidement la capacité des installations, et d’autre part un caractère irrépressible pour l’exploitant du réseau. Outre la submersion des têtes de regards et de boîtes de branchements, il faut aussi citer les cas des usagers qui, à l’intérieur de leur propriété inondée, utilisent leurs installations intérieures d’évacuation des eaux usées, lorsque le réseau n’est pas déjà saturé dans leur quartier, pour évacuer les eaux de pluie ou de nappe, et saturer ainsi le réseau d’eaux usées en aval.

Les solutions pour éviter ces entrées d’eau sont toujours difficiles, coûteuses et longues, voire impossibles, à mettre en œuvre. Elles peuvent être :

  • Tout d’abord de ne pas urbaniser les zones inondables !
  • Dans les zones qui sont parfois inondées, de surélever les têtes des regards et des boîtes de branchement pour qu’elles soient toujours hors d’eau (les regards doivent rester ventilés pour éviter la formation d’hydrogène sulfuré), mais cela est le souvent impossible, la plupart des réseaux étant situés sous voirie ;
    • En l’état actuel de l’urbanisation, prévenir la survenance d’inondations en aménageant pour cela le réseau pluvial. Pour être efficace, cela nécessiterait de réaliser un énorme programme de travaux très importants pour mettre en place et entretenir :
      • D’une part des ouvrages de collecte et d’évacuation des eaux de pluie pluviaux mieux dimensionnés, c’est-à-dire capables de recevoir et évacuer des précipitations de fréquence centennale, et donc surdimensionnés par rapport à qui existe aujourd’hui ; mais cela pourrait aussi être l’opportunité de créer des zones vertes (noues et bassins d’étalement de crue) favorables au bon état écologique du territoire.
        • D’autre part, pour permettre l’évacuation des eaux dans les zones soumises aux fortes marées hautes ou à leur influence, zones qui sont nombreuses et étendues dans notre territoire, des ouvrages spécifiques pour isoler le réseau pluvial amont de la zone aval soumise à l’influence maritime et pour pomper les eaux douces provenant du bassin versant amont vers le Bassin d’Arcachon lorsque le niveau du Bassin est trop élevé pour permettre un écoulement gravitaire. De tels ouvrages existent déjà sur quelques tributaires (ruisseaux de la Mole et de Meyran à Gujan-Mestras), mais il faudrait les généraliser sur l’ensemble des petits ruisseaux et crastes se déversant du Bassin ou dans ses tributaires.
    • Un point très important et prioritaire est la nécessaire remise en cause du schéma directeur de gestion des eaux pluviales. En effet il est censé être conçu pour protéger le territoire des évènements d’une période de retour de 30 ans mais manifestement c’est très loin d’être le cas. Une des principales causes de cet échec est la mauvaise application des prescriptions relatives à l’infiltration à la parcelle : ce principe, certes très vertueux, ne peut être mis en œuvre qu’à condition que le volume à stocker ou le fond du système d’infiltration soit aménagé de sorte à être au-dessus du toit du niveau haut de la nappe, comme cela est d’ailleurs clairement indiqué dans le schéma directeur. Or cette condition n’est pas du tout remplie sur la majorité du territoire où la nappe est affleurante une partie de l’année. De plus, la suppression des fossés et crastes et leur remplacement par des canalisations, autre erreur lourde de conséquences, ne permet plus le drainage des terres gorgées d’eau. Dès lors les dispositifs d’infiltration censés retenir l’eau de pluie pour la restituer lentement à la nappe sont complètement inopérationnels et il ne faut donc pas s’étonner des inondations ainsi provoquées.

Il est donc fondamental de revoir en conséquence la politique du territoire en la matière, en considérant que le principe d’infiltration à la parcelle ne peut être retenu dans le calcul des débits d’eaux pluviales à évacuer dans toutes les zones où la nappe peut être affleurante.

Les débordements générés par ces entrées massives d’eau de pluie impactent forcément le milieu naturel, même s’il s’agit d’eaux usées fortement diluées par des eaux pluviales. Elles provoquent des contaminations bactériologiques du Bassin, et génèrent entre autres des restrictions de consommation des coquillages (novembre 2023 : huîtres zone Arès et palourdes).

A noter que pendant ces épisodes de fortes intempéries, la qualité des eaux du Bassin est aussi impactée d’une part par les apports directs du réseau pluvial et des rivières, qui sont chargés de substances provenant du lessivage des surfaces imperméabilisées et des sols agricoles, et d’autre part par la remise en suspension des sédiments.

Sur le plan réglementaire

La réglementation prévoit également le cas des situations difficilement gérables par l’exploitant du réseau, les « situations inhabituelles » qui permettent de déroger aux obligations réglementaires de résultat du service d’assainissement.

Les arrêtés préfectoraux portant autorisation du système d’assainissement du Bassin d’Arcachon (28/04/2017 et suivants) fixent un niveau de rejet applicable « En dehors des situations inhabituelles décrites à l’article 2 de l’arrêté ministériel du 21 juillet 2015 ».

L’arrêté ministériel du 21 juillet 2015 « relatif aux systèmes d’assainissement collectif et aux installations d’assainissement non collectif, à l’exception des installations d’assainissement non collectif recevant une charge brute de pollution organique inférieure ou égale à 1,2 kg/j de DBO5 » donne la définition des « situations inhabituelles »

Art. 2. – Définitions. Aux fins du présent arrêté, on entend par :

23. « Situations inhabituelles » : toute situation se rapportant à l’une des catégories suivantes :

fortes pluies, telles que mentionnées à l’article R. 2224-11 du code général des collectivités territoriales (qui mentionne « Les eaux entrant dans un système de collecte des eaux usées doivent, sauf dans le cas de situations inhabituelles, notamment de celles dues à de fortes pluies, être soumises à un traitement avant d’être rejetées dans le milieu naturel »);

– opérations programmées de maintenance réalisées dans les conditions prévues à l’article 16, préalablement portées à la connaissance du service en charge du contrôle ;

– circonstances exceptionnelles (telles que catastrophes naturelles, inondations, pannes ou dysfonctionnements non directement liés à un défaut de conception ou d’entretien, rejets accidentels dans le réseau de substances chimiques, actes de malveillance)

Art. 5. – Règles spécifiques applicables au système de collecte. Le système de collecte est conçu, réalisé, réhabilité, exploité et entretenu, sans entraîner de coût excessif, conformément aux règles de l’art et de manière à :

1) Desservir l’ensemble des immeubles raccordables inclus dans le périmètre d’agglomération d’assainissement au sens de l’article R. 2224-6 du code général des collectivités territoriales ou des immeubles à raccorder à l’installation d’assainissement non collectif ;

2) Eviter tout rejet direct ou déversement d’eaux usées en temps sec, hors situations inhabituelles visées aux alinéas 2 et 3 de la définition (23) ;

Les notions de « fortes pluies » et d’ « inondation » manquant de précision et pouvant être sujettes à interprétation, il avait été proposé fin 2016, après une analyse statistique des situations rencontrées lors des différents épisodes pluvieux enregistrés de 2013 à 2016, que soit déclaré au niveau du Bassin d’Arcachon « situation inhabituelle » lorsque les précipitations cumulées sur 7 jours consécutifs dépassent 70 mm. En effet, il apparait que ce cumul correspond souvent à une situation de saturation de la nappe superficielle qui commence alors à déborder et à submerger les ouvrages du réseau ; la notion de cumul de précipitation sur une période est celle qui représente le mieux la signature d’une entrée d’eau par inondation, au contraire d’un épisode intense mais bref qui aura également un impact important sur les débits parasites, mais cet impact-là résulte plutôt, quant à lui, de défauts du réseau tels que de mauvais branchements, défauts plus facilement corrigeables. Cette « définition locale de situation inhabituelle » a été proposée par le SIBA au service chargé de la police de l’eau qui l’a acceptée.

En l’état actuel de l’aménagement de notre territoire et de la réglementation qui s’y applique, les débordements (réseau saturé) et les défauts de traitement (station lessivée par un trop fort débit) sont donc de fait « admis » et susceptibles d’arriver, même si le service d’exploitation fait tous ses efforts pour les empêcher ou les limiter, lorsqu’on se trouve dans ces cas de « situation inhabituelle ».

Ces situations sont déjà intervenues (sur la base des précipitations enregistrées à Gujan-Mestras – site https://www.meteo-gujan.fr/) comme indiqué sur le tableau suivant, où sont aussi reportés le maximum mensuel et le total de précipitations de l’année :

annéenombre d’épisodes de « situation inhabituelle »nombre total de jours de « situation inhabituelle »précipitations mm mois maxiprécipitations mm de l’année
201215162 mm843 mm
2013316159 mm1084 mm
201429183 mm916 mm
201523125 mm707 mm
2016421261 mm1005 mm
2017212182 mm974 mm
201813151 mm990 mm
2019425304 mm1142 mm
2020852334 mm1328 mm
2021831201 mm1190 mm
202217203 mm745 mm
2023 (au 20/12)637460 mm du 18/10 au 12/111424 mm au 20/12

Il est clair que l’épisode que nous avons connu de mi-octobre à début novembre 2023, soit 24 jours consécutifs de « situation inhabituelle » avec une moyenne de 18 mm/jour durant cette période, surclasse de très loin tout ce qu’on avait pu connaître ces dix dernières années.

Néanmoins, même en faisant abstraction de cet épisode, on peut constater que les cas de « situation inhabituelle » sont trop nombreux et de plus en augmentation, augmentation déjà constatée ces dernières années et qui ira en s’amplifiant avec le changement climatique, pour que l’on puisse continuer à les qualifier d’inhabituels.

Il convient donc de revoir, sur le plan administratif, les critères qualifiant la situation d’inhabituelle, et en conséquence d’étudier et de mettre en œuvre, sur le plan technique, les mesures qui permettront de faire face aux situations « non inhabituelles », c’est-à-dire aux situations que l’on rencontre malheureusement chaque année, sans générer de débordement ou de défaut de traitement des eaux usées.

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Intervention du président de l’ADEBA à la commission zostères du PNMBA

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la valvométrie, un outil pour mieux suivre la qualité des eaux

La qualité des eaux du Bassin d’Arcachon fait l’objet d’un suivi conséquent par les organismes en charge, avec des prélèvements réguliers en différents points du Bassin et des analyses de dizaines de paramètres, programme complété par un suivi également réalisé sur les coquillages.

Pour autant, force est de constater que les évènements de mortalité des huîtres, évènements malheureusement fréquents et parfois de grande ampleur, demeurent trop souvent inexpliqués.

Les analyses montrent bien des variations, dans le temps et dans l’espace, des contaminants susceptibles d’altérer le bon état du cheptel ostréicole, mais il est bien difficile d’établir des corrélations entre ces variations et les épisodes de mortalité. Aux difficultés inhérentes à la compréhension du fonctionnement d’un écosystème complexe s’ajoutent celles résultant du fait que les programmes de prélèvements ont leur propre planning et ne sont pas calés sur les variations de l’état de santé des huîtres ; au mieux un prélèvement réalisé dès qu’une mortalité est constatée risque fort d’intervenir après le passage du contaminant qui a généré le phénomène. En fait, il faudrait pouvoir faire le prélèvement dès que l’huître commence à montrer un comportement anormal.

Or cela est possible grâce à une technique, la valvométrie, qui a fait l’objet de nombreux développements dans le monde, et en particulier à la Station Marine d’Arcachon par des équipes du CNRS et de l’Université de Bordeaux. Cela consiste à équiper les huîtres de capteurs collés sur leur coquille et mesurant l’écartement des valves. Ces mesures, effectuées chaque seconde, sont automatiquement transmises en temps réel à un serveur qui les analyse et calcule les temps d’ouverture, l’amplitude d’ouverture, et les micro-fermetures qui rythment l’activité des huîtres. Connaissant déjà la signature type du comportement normal des huîtres, en fonction de la saison, de la marée, des cycles solaire et lunaire, et des évènements naturels comme la ponte, on peut ainsi détecter immédiatement un comportement anormal, comme celui résultant d’une contamination, qu’elle soit naturelle (par exemple par le bloom d’une algue toxique) ou anthropique (par exemple un apport de pesticide).

Voici quelques informations fournies par la station marine d’Arcachon,

  • Sur la technique mise en œuvre
  • Sur le type d’enregistrement généré

Le lecteur plus curieux pourra utilement prendre connaissance des nombreux articles scientifiques publiés par les chercheurs de la Station Marine, comme par exemple :

Field Chronobiology of a Molluscan Bivalve: How the Moon and Sun Cycles Interact to Drive Oyster Activity Rhythms , de Tran et al, publié dans  Chronobiology International, 28(4): 307–317, (2011)

High Frequency Non-invasive (HFNI) Bio-Sensors As a Potential Tool for Marine Monitoring and Assessments, de Andrade et al, publié dans Front. Mar. Sci., 04 October 2016, Sec. Marine Ecosystem Ecology, Volume 3 – 2016 

Monitoring Biological Rhythms Through the Dynamic Model Identification of an Oyster Population, de Ahmed et al, publié dans IEEE Transactions on systems, man, and cybernetics systems, vol. 47, N°. 6, June 2017

Subchronic exposure to high-density polyethylene microplastics alone or in combination with chlortoluron significantly affected valve activity and daily growth of the Pacific oyster, Crassostrea gigas, de Bringer et al, publié dans Aquatic Toxicology 237 (2021) 105880  

On peut trouver sur le web une multitude d’articles montrant que la valvométrie est un domaine largement exploré, non seulement à Arcachon, mais dans le monde entier (quelques exemples : la coquille Saint Jacques à Saint Brieuc Plos One January 11, 2023   https://doi.org/10.1371/journal.pone.0279690 ; la palourde à Venise ENVIRONMENTAL PARAMETERS INFLUENCING VALVE MOVEMENTS OF MANILA CLAM FARMED IN VENICE LAGOON Aquaculture Europe 2022 ; St Pierre et Miquelon Acoustic impact of ship traffic on mussels and scallops https://anr.fr › Project-ANR-19-FQ. ; Canada Étude de l’effet de toxines sur le comportement valvaire de bivalves. Institut des sciences de la mer de Rimouski ; Australie Murdoch’s secret spies revealed  Murdoch University  https://www.murdoch.edu.au ; Russie IOP Conf. Series: Earth and Environmental Science 625 (2021) 012013  doi:10.1088/1755-1315/625/1/012013 ; et l’article du Entangled Bank Laboratory Designing the Next Generation of Condition Tracking and Early Warning Systems for Shellfish Aquaculture J. Mar. Sci. Eng. 2021, 9(10), 1084; https://doi.org/10.3390/jmse9101084  a recensé de son côté deux douzaines de modèles statistiques pour interpréter les enregistrements de valvomètres et une demi douzaine de systèmes d’alarme basés sur la valvométrie).

Cette technique a considérablement évolué depuis une vingtaine d’années, tant dans la mesure du comportement valvaire que dans l’interprétation des résultats. Elle ne saurait évidemment pas constituer une solution miracle, mais elle peut toutefois s’inscrire comme un outil complémentaire apportant une valeur ajoutée dans le suivi de la qualité des eaux.

Lorsque, comme c’est le cas sur notre Bassin, nous avons déjà un suivi conséquent de la qualité des eaux tout au long de l’année mais que nous subissons d’une part des variation parfois très importantes des différents contaminants qui peuvent être liées par exemple à des phénomènes météorologiques, et d’autre part des épisodes de mortalité dont nous avons du mal à connaître les causes, il serait très intéressant de pouvoir effectuer les prélèvements au plus près du moment où on détecte un comportement anormal des huîtres. Cela permettrait de mieux cerner quels contaminants, seuls ou en mélange, et à quelles concentrations, sont les plus délétères.

Aussi l’ADEBA préconise-t-elle que ce dispositif soit mis en place et utilisé dans le Bassin pour surveiller le comportement des huîtres au plus près des zones de production. On disposerait ainsi d’une alerte qui permettrait d’adapter en temps réel le planning des prélèvements, donc d’analyses plus pertinentes et de meilleurs éléments de compréhension des phénomènes. La mise en place de mesures de gestion pour éviter ou limiter ces phénomènes serait mieux ciblée et y gagnerait beaucoup en efficacité.

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Observations de l’ADEBA sur le projet de SCoT du SYBARVAL (projet arrêté le 25 mai 2023 par les élus du SYBARVAL)

Remarques sur l’élaboration et la conformation des documents du SCoT

De nombreuses erreurs ou anomalies sont relevées.

Les données d’entrée sont incomplètes ou erronées :

  • De nombreux cours d’eau, bien qu’identifiés au titre de l’article L215-7-1 du code de l’environnement et présentés sur la cartographie des cours d’eau de la Gironde de la DDTM, sont absents des cartes présentées dans le projet de SCoT.
  • La pollution des nappes phréatiques est méconnue : dans l’objectif 2 du PAS, le texte cite les compartiments à protéger pour veiller à la qualité de la ressource en eau (cours d’eau, lagunes, fossés, eau salée) mais oublie les nappes ; dans l’objectif 5 du PAS la limitation de l’imperméabilisation est présentée comme moyen d’éviter le ruissellement (vers le Bassin) de tous les résidus d’activités humaine en oubliant que ces résidus vont alors pour la plupart se retrouver dans la nappe, et donc à terme dans le Bassin.
  • Les zones humides ont été oubliées dans l’identification des réservoirs de biodiversité (DOO p 9, 3.4 p 6)
  • Pour la prévention des risques, le scénario du GIEC retenu par le projet de SCoT est le RCP 2.6 du 5ème rapport (p 186 du DOO). Or chacun sait que ce scénario, qui était le plus optimiste, ne pourra pas être tenu ; le 6ème rapport du GIEC, rendu public début 2023 a constaté une nouvelle dégradation de la situation générale et a revu à la hausse le niveau des risques encourus. Le scénario optimiste retenu dans le projet de SCoT avait d’ailleurs déjà été écarté par le Straddet. Les risques induits par le changement climatique sont donc manifestement très sous-évalués, ce qui ne peut qu’avoir des conséquences désastreuses pour notre territoire, avec entre autres l’élévation du niveau de la mer et l’intensification des phénomènes météorologiques extrêmes.
  • Dans la carte des surfaces inondables par submersion marine (3.2 p 163) le secteur de la Canelette à La Teste n’apparait pas alors qu’il est à un niveau bien inférieur aux zones inondables présentées.

Des incohérences, des lacunes, des biais ou des flous dans la présentation de certains points perturbent la lecture et une bonne compréhension du sujet, et le plus souvent cela conduit encore à une sous-estimation des risques :

  • Sur le risque de remontées de nappe, le document BRGM cité en référence (DOO p 44) est introuvable et le risque est minimisé par une appréciation réservée de la qualité de la carte de sensibilité présentée (3.2 p 165/166), alors que ce risque est bien connu comme important et avéré sur la majeure partie du territoire.
  • La ressource en eau potable est présentée comme déjà surexploitée (3.2 p 113 volume prélevé supérieur à autorisation) et en voie de raréfaction mais cela n’empêche pas le projet de SCoT de prévoir une poursuite de l’augmentation de la population sans fixer de règles claires et précises pour garantir une réduction de la consommation. Ainsi, dans la prescription 32, le projet de SCoT, après avoir signalé dans ses documents préparatoires que les volumes prélevés étaient déjà au maximum et que la ressource allait se réduire, laisse aux communes le soin de « s’assurer de la disponibilité de la ressource en eau potable avec les perspectives démographiques liées au développement urbain attendu dans le rapport de présentation », mais a déjà néanmoins, sans avoir étudié la possible adéquation ressources futures / besoins futurs, fixé un objectif d’augmentation de population substantiel. C’est irresponsable et dangereux ; cette situation impose de viser un objectif de population plus réduit.
  • La présentation sommaire des pollutions, notamment des eaux (3.2 p 179) évoque l’augmentation de certains polluants (HAP), mais au-delà de ce simple constat de l’augmentation du niveau de contamination du milieu marin, aucun développement n’est fait dans le projet de SCoT sur les possibles scénarios d’évolution de ce type de risque ni a fortiori sur les prescriptions prévues pour le réduire.
  • Incohérence sur la corrélation entre concentration en biocide et pluviométrie entre le graphique et le commentaire (3.2 p 102).
  • La numérotation des objectifs diffère entre le PAS et le DOO, ce qui fragilise la cohérence de l’ensemble.
  • Evaluation environnementale : La méthodologie mise en œuvre conduit (3.4 p 4) à justifier le scénario retenu en comparaison avec un scénario « au fil de l’eau », c’est-à-dire avec le scénario le plus laxiste possible. Forcément, cette comparaison ne peut que montrer que tout scénario comportant les moindres contraintes, si faibles soient elles, par rapport à une absence de contraintes sera plus vertueux. Un tel procédé fait fi des limites des ressources du territoire et ne démontre aucunement que le scénario retenu ne conduira pas à des problèmes majeurs.

Enfin, les cartes présentées dans l’annexe DOO 2.2 ont une résolution très grossière et ne sont que de simples illustrations ne permettant pas de situer avec précision les limites des différentes zones ; elles sont inexploitables et n’offrent aucune garantie sur la bonne préservation des zones qui devraient l’être.

Au final, l’ensemble produit comporte sur la forme des erreurs, des lacunes, des incohérences et des imprécisions qui le rendent impropre à constituer le document de référence opposable qu’il devrait être.

Remarques sur le contenu des prescriptions

Nous constatons un manque général de volonté pour préserver et restaurer le bon état de l’écosystème du territoire, pourtant déjà très affecté par la pression anthropique.

Prescription 2 : dans la liste des zonages naturels (N) spécifiques des espaces identifiés devant être délimitée dans les P LU il manque les zones humides prioritaires identifiées dans les SAGE. En effet, les zones humides jouent un rôle prépondérant dans le maintien de la qualité de l’eau s’écoulant vers le Bassin d’Arcachon. En cas de pluie elles ralentissent l’arrivée de l’eau vers le Bassin, limitant ainsi l’effet de lessivage des sols, lessivage responsable de l’arrivée massive de polluants dans le Bassin. De plus, grâce au travail de filtration qu’elles opèrent, les zones humides jouent un rôle d’assainissement des eaux de pluie qui percolent dans la nappe phréatique ou se dirigent vers le Bassin. 

Prescription 3 /recommandation 10 : il est dommage que la prescription n’inclue pas la recommandation 10 car la création de Z. A.P. est le moyen de 1) préserver les ZA de la pression foncière et 2) de maîtriser le type d’agriculture/élevage présent au profit de pratiques vertueuses pour la qualité de l’eau (pas de porcheries par exemple).

Prescription 4 : cette prescription commence par la phrase : « ces espaces sont préservés de tout mode d’occupation… » Il serait préférable de préciser « espaces agricoles naturels et forestiers ». Il faudrait aussi préciser que la construction dans les zones agricoles ne peut être autorisées qu’aux exploitants dont l’activité agricole représente la principale source de revenus, afin d’éviter que de de « faux » agriculteurs y construisent, comme cela a déjà été trop souvent constaté.

Prescription 5 : l’installation ponctuelle de structures démontables dans les corridors écologiques est difficilement compatible avec la préservation de la biodiversité tant floristique que faunistique (piétinement du sol, le trafic, etc…). De plus, cette prescription ne prévoit pas de durée maximale de mise en place des installations démontables. Ainsi des structures peuvent être montées et laissées des années sans être démontées et totalement perturber la biodiversité. Idem pour les Prescriptions 15, 18, Recommandation 6,.…

Prescription 6 : dans cette prescription il serait intéressant de préciser la notion d’intérêt public.

Prescription 7 :  il est à regretter que cette prescription ne soit pas plus volontaire afin que dans les zones de protection réglementaire et inventaires existants et ce en y incluant les zones humides prioritaires, l’urbanisation ne soit pas simplement interdite. De plus, dans cette prescription le taux de compensation n’est pas spécifié.

Prescription 8 : il manque les zones humides prioritaires. Car, comme les cours d’eau, les zones humides prioritaires jouent un rôle important dans la préservation de la biodiversité.

Prescription 9 : le recul non aedificandi (calculé depuis le haut de la berge) ne prend pas du tout en compte le lit majeur des cours d’eau. Or il constitue la zone de stockage de l’eau en cas d’inondations et remplit des fonctions d’épuration de l’eau lors de son relargage progressif vers le Bassin. La préservation du lit majeur des cours d’eau se jetant dans le Bassin d’Arcachon participe à la bonne qualité de l’eau du Bassin. Idem Prescription 54 restauration du lit majeur des cours d’eau.

Recommandation 2 : rajouter les zones humides prioritaires.

Prescription 14 : (trame noire) il est regrettable de limiter aux plans locaux d’urbanisme des communes membres du parc régional des Landes de Gascogne l’intégration à leur rapport de présentation du diagnostic trame noire. Toutes les communes du territoire du Scot méritent d’être concernées, considérant l’économie d’énergie comme bénéfice collatéral de cette mesure.

Recommandation 7 : la transformer en prescription pour préserver le rôle important des lisières par rapport à l’eau.

Prescription 27 : l’infiltration à la parcelle, certes nécessaire comme première règle de base, n’a de sens que lorsque la nappe phréatique est suffisamment basse. En période de nappe très haute, voire affleurante comme c’est souvent le cas lors d’intempéries dans de nombreuses zones du territoire, elle est totalement inefficace. Il n’y a rien de prévu dans le SCoT pour ces situations alors qu’elles sont courantes et très problématiques.

Le SCoT, qui rappelle bien par ailleurs que « la qualité de l’eau est essentielle », ne dit rien sur la pollution apportée par les eaux pluviales et les prescriptions/recommandations à prendre pour la maîtriser.

Prescription 31 : cette prescription concerne en fait la qualité de la ressource en eau potable et devrait se trouver en 2.1 ; il n’y a aucune prescription ou recommandation pour maîtriser et réduire aucune des diverses pollutions générées par toutes les activités humaines.

Prescriptions 40 à 42 : les projets de parcs photovoltaïques sur les surfaces qui ne sont pas déjà artificialisées (surfaces polluées, en reconversion ou à réhabiliter) devraient comporter une étude sur le devenir des eaux météoriques.

Prescription 43, Recommandations 40 et 41 relatives à l’implantation de centrale de méthanisation : il manque des prescriptions sur le devenir des digestats (et leur éventuel épandage au sol) et des rejets divers par rapport à la pollution possible des cours d’eau, nappe phréatique et Bassin d’Arcachon.

Recommandations 42,43,45 relatives à la production d’hydrogène sur le territoire : sachant qu’il faut 9 tonnes d’eau pour produire 1 tonne d’hydrogène, la production d’hydrogène à grande échelle pourrait perturber l’équilibre du cycle de l’eau son impact doit être étudié.

Prescription 51 : Les PLU doivent intégrer « les dispositions des plans et stratégies de prévision des risques en vigueur » : il faut d’abord imposer aux communes l’établissement des plans obligatoires non encore établis (PPRIF par exemple, pour lequel 4 communes seulement sont citées p 45).

4.7 Gérer le recul du trait de côte : Le projet de SCoT n’évoque que le cas des communes de Lège-Cap-Ferret et de La Teste-de-Buch et raisonne uniquement sur le niveau actuel de la mer (cf Volet Littoral, p154 définition du trait de côte comme la laisse de haute mer d’une marée de coefficient 120 dans des conditions météorologiques normales).

Or :      – le niveau de la mer va continuer à monter significativement

(voir dernier rapport du GIEC et prévisions BRGM),

– les conditions météorologiques normales ne peuvent servir de base pour définir un niveau de risque, il faut prendre en compte les conditions extrêmes, qui vont également se dégrader dans le futur,

– tout le littoral du territoire est concerné par la submersion marine, et pas seulement celui des communes océaniques.

Le projet de SCoT présente donc de graves lacunes sur toutes les zones ainsi concernées, qui doivent être définies et soumises à des règles strictes (protection, aménagement, repli) à inscrire formellement dans le SCoT. Cette contrainte, fortement impactante mais inévitable, remet en cause de nombreuses dispositions prévues pour l’aménagement du territoire.

7.2 offre d’hébergement touristique : alors que nous connaissons déjà des sur fréquentations estivales, le projet de SCoT affirme que « l’offre en hébergements touristiques est insuffisante » (PAS). On pourrait comprendre la recherche d’un meilleur étalement dans l’année de l’accueil touristique, mais il faut éviter tout ce qui pourrait conduire à une aggravation de la pointe estivale, et au contraire chercher à la réduire. Rien de tout cela n’apparaît dans les prescriptions présentées.

Et si le projet de SCoT reconnaît que « l’augmentation de la fréquentation est source de nuisances de divers ordres (déchets, stationnement sauvage, risques de feux de forêt accrus, développement anarchique de certains usages…) qu’il convient de prendre en compte »  (3.2 p 186), nous ne pouvons que déplorer qu’il ne donne pas de prescription pour réduire significativement et efficacement ces nuisances.

Prescriptions 180 et 181 : La limitation des pratiques motorisées récréatives doit être étendue au domaine maritime pour limiter les nuisances provoquées (survitesse, bruit, batillage, pollution, …).

Recommandation 113 : il est surprenant que des activités « nature » ne générant aucune nuisance sur l’environnement et les autres usagers, comme le paddle, soient traitées de la même manière que des activités motorisées générant de nombreuses nuisances, comme le jet ski, et on peut se demander comment les professionnels du territoire qui vont participer à l’encadrement particulier de ces pratiques si différentes pourraient avoir le même référentiel pour la préservation de l’environnement.

Recommandation 116 relative à la réutilisation des sédiments issus du dragage du Bassin et de ses ports ; il serait bon de préciser que leur réutilisation doit être autant que possible évitée sur le bassin versant du Bassin d’Arcachon et qu’a minima l’impact potentiel des polluants contenus dans ces sédiments et leur devenir (contamination de la nappe et du Bassin) doit être sérieusement étudié.

11.2 Soutenir l’économie forestière : Afin de réduire la pollution des eaux, il convient de prendre des dispositions pour réduire et supprimer à terme l’emploi de pesticides en sylviculture.

Tome 2 – DOO Volets Littoral et Maritime : Le document évoque l’exposition aux effets des sports motorisés et la volonté d’encadrer ces pratiques (p 182) mais aucune prescription n’apparaît dans le DOO pour réduire les nuisances générées par ces activités sur le plan d’eau. L’impact du motonautisme sur les émissions de polluants n’est pas évoqué bien qu’il ait été clairement démontré dans de récentes études (cuivre, HAP, …).

Le document rappelle (p 261) que le Bassin « représente aujourd’hui 20% du parc de mouillage à l’échelle nationale » mais ne fait aucune remarque sur l’énormité de ce chiffre (rapporté au 1,45% de linéaire du littoral métropolitain que représente le Bassin) et sur les impacts de cette concentration sur l’environnement, et le projet de SCoT ne fixe aucun objectif pour le ramener à des valeurs plus raisonnables.

Le Bassin a une concentration / densité de bateaux de plaisance excessive et disproportionnée par rapport à la taille du plan d’eau, et la très grande majorité de ces bateaux sont massivement sous-utilisés. Le premier objectif d’enjeu de développement durable devrait être de maîtriser et réduire la taille de cette flotte, en privilégiant les pratiques douces (voile, kayak, …) et en réduisant celles génératrices de nuisances (pollutions, bruit, vagues, …).

D’autre part, le carénage, qui impacte pourtant si négativement la qualité des eaux du Bassin, n’est jamais évoqué dans le projet de SCoT. Il devrait l’être, en prescrivant les bonnes pratiques (interdiction des produits les plus polluants, mise aux normes des installations de carénage, …) et le développement de pratiques vertueuses.

Enfin, les dernières prévisions de montée du niveau de la mer et d’augmentation en fréquence et en intensité des phénomènes météorologiques violents doivent être prises en compte et impactent fortement les dispositions à prendre pour la bande côtière (voir plus haut Gérer le recul du trait de côte).

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Lettre à la Préfecture sur contamination au cuivre du Bassin d’Arcachon

Suite à la publication de rapport « le cuivre dans le Bassin d’Arcachon : synthèse des connaissances », et en parallèle au courrier adressé aux auteurs pour demander les études complémentaires jugées nécessaires (voir analyse technique du document dans la rubrique « Avis »), l’ADEBA a adressé en octobre 2023 un courrier à la Préfecture :

  • en attirant son attention sur la reconnaissance formelle, explicitement décrite dans ce rapport, d’une atteinte à l’environnement, avec notamment un impact néfaste sur le cheptel ostréicole, provoquée principalement par les peintures antisalissures utilisées dans le Bassin d’Arcachon ;
  • en lui demandant de prendre les mesures de gestion qui permettront de faire cesser au plus tôt cette pollution d’un site Natura 2000, que ce soit par l’interdiction de commercialisation et/ou d’utilisation de produits polluants, à l’instar de l’article 12 de l’arrêté du 6 février 2014 portant schéma des structures des exploitations des cultures marines pour le département de la Gironde, par l’obligation d’employer des procédés respectueux de l’environnement (nettoyage mécanique des coques, …), par la limitation du nombre de bateaux sur le plan d’eau (réduction des zones de mouillage), ou par une combinaison de ces moyens.
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Le cuivre dans le Bassin d’Arcachon : synthèse des connaissances ; document IFREMER-SIBA juin 2023

La concentration en cuivre dans les huîtres du Bassin d’Arcachon, en augmentation constante depuis les années 1980, inquiète scientifiques et ostréiculteurs. Les suivis mis en place par IFREMER et par le SIBA ont permis d’acquérir une masse de connaissances dont la synthèse est présentée dans un rapport publié en juin 2023 sur les sites de ces organismes.

Ce rapport, attendu depuis plusieurs années, s’articule autour des questions suivantes :

  • Quelles sources possibles de cuivre dans l’environnement du Bassin d’Arcachon et ces apports ont-ils évolué au cours du temps ?
  • Quelle est la contamination en cuivre des différents compartiments (eau, sédiment, flore et faune) du bassin ? Comment a-t-elle évolué au cours du temps et est-elle élevée par rapport à celle mesurée dans d’autre sites côtiers ?
  • Les concentrations en cuivre mesurées dans le Bassin sont-elles susceptibles de présenter une toxicité pour le biote ?

Sont présentés ci-après les points les plus importants (les extraits du rapport sont en italique) et les questions posées par l’ADEBA.

Sources possibles

La principale source, toujours active, est l’utilisation « des peintures antisalissures qui protègent la coque des navires contre le fouling. Cette pression est l’une des seules qui a pu être quantifiée à plusieurs reprises et s’avérait déjà importante il y a deux décennies, mais en l’absence d’enquêtes récentes on ignore comment elle a évolué par la suite. » (p16)

L’augmentation constante de la population du bassin versant génère celle des sources liées à l’urbanisation et au trafic routier. (p17)

Contamination des différents compartiments

La concentration dans les huîtres est en augmentation constante depuis 1980 (et bien marquée pour la période 2010-2022 dans les zones internes du Bassin), et élevée par rapport aux autres sites de Manche-Atlantique. (p20)

La concentration dans les algues était à la fin des années 1980 typique de zones soumises à une contamination élevée mais on semble manquer de données plus récentes et le rapport préconise de futures vérifications. (p39)

La concentration dans les eaux est du même ordre de grandeur que dans les autres zones côtières mais plus élevées aux Jacquets (zone de mouillage) et plus fortes en été. L’eau des ports est particulièrement contaminée et influe sur la concentration des zones attenantes. Le ruissellement urbain entraîne également, lors de fortes pluies, de fortes quantités de cuivre. (p63)

La concentration dans les sédiments est plutôt faible hors zones portuaires et de corps morts. Elle augmente en fonction de la concentration de bateaux, est plus élevée dans les zones de mouillage et encore plus dans les ports. (p68)

Toxicité pour le biote

Les concentrations dans le phytoplancton sont délicates à apprécier et sa sensibilité est extrêmement variable selon les espèces ; on sait toutefois que son métabolisme peut être affecté et limiter son développement. (p71)

Si les concentrations en cuivre seul dans les zostères ne semblent pas dépasser les valeurs nuisibles à leur croissance, on sait que leur sensibilité augmente en présence d’autres contaminants (pesticides, …) ou de conditions stressantes (forte température, faible éclairement). (p76)

Pour les huîtres, les concentrations mesurées dans les eaux sont susceptibles d’altérer leur reproduction, avec toutefois une sensibilité décroissante lorsque la salinité augmente. Néanmoins, comme dans le cas des zostères, il a été montré que l’effet d’un mélange de contaminants est plus important que celui des contaminants pris séparément. De plus, il a également été montré que la présence de cuivre peut affecter l’index de condition des huîtres en raison de son impact sur la composition en acides gras du phytoplancton dont elles se nourrissent. (p80)

En conclusion, le rapport :

  • met en avant l’origine anthropique du cuivre, avec comme source principale les peintures antisalissures et en second le trafic routier
  • signale le manque de données récentes sur l’évolution de ces apports
  • explique que l’impact du cuivre sur les huîtres est bien réel mais très complexe car
    • il peut se manifester sur les différentes fonctions (alimentation, métabolisme et détoxification, reproduction),
    • il dépend des conditions environnementales comme la salinité et la turbidité, elle-même liée à l’évolution du milieu (régression des zostères)
    • il est plus fort en cas de mélange avec d’autres contaminants (ce qui est bien le cas dans la réalité)

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Ce rapport, dont la qualité est indéniable, tant par la masse de données collectées et traitées (études locales et recherches bibliographiques) que par l’effort d’analyse et de synthèse, confirme le bien fondé des craintes sur l’impact négatif du cuivre sur les huîtres du Bassin et la responsabilité première du nautisme. De nombreux points restent néanmoins en suspens, et l’ADEBA a écrit aux auteurs en demandant que ce rapport soit complété et régulièrement mis à jour avec :

  • des données actualisées sur l’utilisation des peintures antisalissures, 
  • un suivi rapproché régulier des points du plan d’eau présentant les plus fortes concentrations,
  • des études complémentaires sur l’effet de mélange, et l’adaptation des programmes de suivi déjà en place pour tenir compte de cet effet,
  • une meilleure connaissance des apports du réseau pluvial (lessivage des voiries),
  • une étude approfondie de la contamination de la nappe superficielle (le rapport indique qu’elle est extrêmement variable sans qu’il soit actuellement possible d’en comprendre la cause), en vérifiant l’éventuel relargage des contaminants contenus dans les sédiments de dragage réutilisés sur le bassin versant.

Par ailleurs, les atteintes répétées à l’environnement causées depuis des décennies par les différentes peintures antisalissures ne pouvant être stoppées que par une transition vers des solutions ne générant pas de relargage de contaminants dans le milieu, l’ADEBA demande également :

  • que soit réalisé un état des lieux des différentes solutions alternatives développées ou testées dans le monde,
  • que soient menées, en impliquant les gestionnaires des ports, des expérimentations volontaristes sur celles pouvant être mises en œuvre dans le Bassin, 
  • que soient définies les conditions de la mise en œuvre généralisée de celles s’avérant les mieux adaptées au Bassin,
  • que soit fixé le cadre organisationnel et réglementaire de cette transition.
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Sobriété énergétique et motonautisme

Constatant que les activités maritimes étaient les oubliées du plan de sobriété énergétique mis en œuvre par le gouvernement fin 2022, l’ADEBA a, en janvier 2023, saisi notre députée ainsi que le Secrétaire Général à la mer pour les alerter sur cette lacune, en leur exposant les points suivants.

De la même manière que l’on demande à tous les automobilistes de limiter leurs déplacements, y compris professionnels, de réduire leur vitesse pour moins consommer, de préférer les transports non ou peu polluants, il faut demander aux usagers de la mer de faire évoluer leurs pratiques dans la même direction.

Notre territoire, le Bassin d’Arcachon, est le témoin, comme bien d’autres zones littorales, d’une inflation constante tant en nombre qu’en puissance des embarcations motorisées. Si l’ensemble des activités nautiques s’inscrivent dans la même trajectoire ce sont particulièrement les activités récréatives (plaisance motorisée, location de jet ski, bateau taxi) qui connaissent une expansion sans précédent. L’incidence de ces activités sur la consommation de carburant comme sur l’impact environnemental nous oblige à les qualifier d’inconséquentes et d’anachroniques.

Outre la consommation de carburant et l’importation sans cesse croissante de moteurs hors-bord et autres jet skis, l’impact environnemental est en effet important dans un territoire particulièrement sensible avec une contamination en HAP qui se situe déjà nettement au-dessus de la moyenne nationale. On peut également déplorer d’autres nuisances, comme les perturbations causées à la faune par le bruit d’engins surpuissants ou les accidents causés par des usagers trop souvent inexpérimentés et irrespectueux.

Prenant  la  mesure  de  ce  phénomène  et  de  ses  conséquences,  le  plan  de  sobriété énergétique s’impose comme étant le véhicule approprié pour porter des mesures incitatives fortes (réglementaires, techniques, fiscales) pour encadrer ces pratiques en les amenant à réduire leur consommation de carburant et limiter les comportements non vertueux.

Il n’est bien sûr pas question de restreindre l’accès à nos plans d’eau mais plutôt de favoriser les usages non polluants et respectueux de l’environnement, comme la voile ou le kayak, encore une fois à l’instar de ce qui se fait pour les transports terrestres avec le vélo par exemple. Ce sont de plus des activités plus facilement accessibles au plus grand nombre ; on peut aussi noter que, contrairement au motonautisme, elles ne nécessitent pas d’onéreuses importations.

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Pollution aux HAP et feux de forêt

La pollution des eaux du Bassin et de huîtres par les HAP a fait l’objet de divers suivis montrant l’importance relative de cette pollution qui se situe à un niveau préoccupant.

Le rapport de synthèse HAP publié par le SIBA en 2021 cible les feux de cheminée comme principale source de cette pollution.

Aussi, suite aux importants feux de forêt de l’été 2022, l’ADEBA s’est inquiétée de l’impact provoqué par ces feux de bois sur la qualité des eaux du Bassin et son écosystème.

L’ADEBA a donc questionné la Préfecture de la Gironde en demandant 1) quels programmes de prélèvements, mesures et analyses, avaient été mis en place par les divers organismes contribuant au suivi environnemental, pour d’une part apprécier la nature et l’importance des apports de HAP générés par ces incendies dans le milieu naturel (air, eaux douces, eaux marines) et dans les organismes vivants (en particulier coquillages), et d’autre part, par signature moléculaire, traçage isotopique ou toute autre méthode analytique, pour les distinguer des autres apports (transport routier, motonautisme, etc.), et 2) quels étaient les résultats de ces mesures.

Une première réponse de la Préfecture a rassuré ADEBA en septembre 2022 sur le sujet, en indiquant que les premières mesures effectuées ne montraient pas de contamination du milieu suite aux incendies.

Cette réponse restant très générale, et n’apportant aucune réponse précise aux questions posées par l’ADEBA, l’ADEBA a de nouveau écrit à la Préfecture en octobre 2022 en demandant les mêmes précisions et en indiquant que, s’il s’avérait donc que ces incendies n’ont pas eu d’impact significatif dans la teneur en HAP des eaux du Bassin, il convenait alors de revoir sérieusement l’état de nos connaissances sur le sujet.

En effet, les rapports déjà publiés sur le sujet attribuant à la seule combustion du bois pour le chauffage domestique une part prépondérante dans les apports de HAP au milieu naturel, on pouvait légitimement supposer, au vu des volumes de bois brûlés lors des incendies de cet été et de la densité des fumées constatée plusieurs jours sur le plan d’eau du Bassin, que la signature de ces incendies sur la teneur en HAP des eaux du Bassin allait être très significative.

Cette hypothèse semblant être écartée, cela remet en cause l’interprétation que l’on pouvait avoir des conclusions des études précitées, études d’ailleurs basées sur de nombreuses estimations et extrapolations. Il importe donc de rechercher de manière plus précise les origines exactes des HAP présents dans les eaux du Bassin, afin de connaître réellement le niveau d’incidence de chacune des différentes sources identifiées d’émission de HAP dans la contamination du milieu marin, et qu’en conséquence les politiques publiques puissent être adaptées afin de combattre efficacement cette pollution.

On peut par ailleurs noter que le rapport de synthèse HAP du SIBA, identifiant le motonautisme comme autre source de pollution aux HAP, indiquait que des études complémentaires devaient être menées pour mieux cerner cette source, mais il semble que ces études ne soient toujours pas réalisées, ce qui est très regrettable.

Suite à ce deuxième courrier à la Préfecture, la DDTM (Direction Départementale des Territoires et de la Mer) a répondu, dans la même lignée que la première réponse, que les analyses étaient bonnes sans donner plus de détails.

L’ADEBA a alors écrit à la DDTM un courrier plus technique demandant que plus d’investigations soient menées sur l’origine des HAP trouvés dans le Bassin :

«  » Comme nous avions essayé de l’exprimer dans nos précédents courriers, nous pensons qu’il est nécessaire de mener des investigations approfondies, au-delà des conséquences des incendies de l’été dernier, sur la part relative de chacune des sources potentielles d’émission de HAP dans la contamination du milieu marin (eau et faune).

Plusieurs méthodes ont été développées pour tracer l’origine des HAP retrouvés dans le milieu naturel et ont été largement utilisées de par le monde, comme le relatent de très nombreux articles scientifiques.

L’ONEMA et l’INERIS ont réalisé une étude sur le sujet et publié en 2014 un rapport intitulé « Bilan des méthodes d’identification des sources applicables au domaine de l’eau et premier choix des profils caractéristiques appropriés » https://professionnels.ofb.fr/sites/default/files/pdf/66_ONEMA_DRC-13-SourcesHAP.pdf qui liste les méthodes déjà employées à l’époque pour établir la contribution des sources potentielles aux niveaux des HAP observés dans le milieu aquatique, et il est fort probable que les connaissances de la communauté scientifique aient encore progressé depuis.

Or, à notre connaissance, la détermination de l’origine des HAP présents dans les eaux du Bassin n’a jusqu’à présent pas fait l’objet d’études mettant en œuvre toutes les méthodes d’identification disponibles. Si le Bassin s’enorgueillit, à juste titre, d’être pionnier sur divers sujets dans les domaines de la recherche et de l’environnement, nous ne pouvons que souhaiter qu’il en soit de même sur celui-là, et nous renouvelons, en les ayant ainsi précisées, nos demandes précédentes. «  »

Ce dernier courrier est pour l’instant resté sans réponse.

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Stagiaires ADEBA 2020

En 2020 l’ADEBA a fait travailler deux stagiaires de Master 2, pendant 6 mois, sur les sujets suivants :

  1. Activités de carénage : réglementation, bonnes pratiques, point sur la situation dans le Bassin d’Arcachon (antifoulings, …) et préconisations pour un moindre impact environnemental, avec un stagiaire en Droit de l’Environnement,
  2. Suivi analytique de la qualité des eaux : compilation des suivis existants réalisés par les différents organismes impliqués, analyse des résultats préoccupants, identification des points sensibles, avec un stagiaire en Bioressources aquatiques.

Le début des stages a malheureusement coïncidé avec le début de l’épidémie de Covid, ce qui a fortement perturbé leur déroulement.

Le travail du premier stage est resté trop général et superficiel et n’a pas pu aboutir à un résultat réellement exploitable par l’ADEBA.

Par contre le second a pu être très productif et a fourni à l’ADEBA une vision exhaustive et détaillée des problèmes de qualité des eaux du Bassin et de leurs origines. Il a en particulier fait apparaître une corrélation entre le débit de la Leyre, principal tributaire du Bassin, et sa concentration en pesticides ; alors qu’on pourrait intuitivement penser que lors d’une crue l’augmentation du débit générée par la pluie viendrait diluer les polluants charriés par la rivière, il apparaît qu’au contraire on constate une augmentation de la concentration des polluants, et par conséquent une très forte augmentation des masses de polluants déversés dans le Bassin (cela pourrait expliquer la mortalité de zostères que l’on constate souvent sur le terrain suite à de fortes pluies). Cette corrélation, qui n’avait pas encore été relevée par les organismes en charge du suivi de la qualité des eaux, leur a été présentée et elle est maintenant admise, comprise (lessivage des sols et entraînement des polluants qui s’y sont accumulés), et intégrée dans leurs comptes rendus.

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