Contrat de territoire : oui … MAIS

On se souvient qu’au lendemain des débordements d’eaux usées de l’hiver 2023-2024 et de la crise sanitaire qui a suivi, le SIBA avait tenté de nier sa responsabilité dans la pollution des eaux par norovirus et d’en faire porter une lourde part aux autres collectivités du bassin versant.

Les discussions menées depuis entre les différents acteurs du territoire, toujours à la recherche d’un consensus, ont abouti au « contrat territorial : Fleuve et côtiers du Bassin d’Arcachon », tout récemment signé par une trentaine de partenaires et intégré aux programmes de l’Agence de l’Eau.

L’ADEBA ne peut qu’approuver toute démarche qui concourt à la préservation des eaux du Bassin, mais elle tient à remettre les pendules à l’heure et vient pour cela d’adresser aux signataires du contrat la lettre ouverte suivante :

Lettre ouverte de l’ADEBA aux signataires du contrat

Le 25 novembre dernier a été annoncée la signature par une trentaine de partenaires (état, agence de l’eau, collectivités territoriales, SAGEs, parcs naturels, …) du contrat territorial « Fleuve et côtiers du Bassin d’Arcachon ».

On ne peut évidemment que se réjouir d’une telle démarche fédérant tous les acteurs du bassin versant, approuver ses objectifs, dont le premier est la réduction des pressions domestiques polluantes afin de préserver la qualité des eaux du Bassin d’Arcachon, et encourager les acteurs à mettre rapidement en œuvre toutes actions utiles pour atteindre les objectifs annoncés.

Toutefois, des points importants doivent être précisés, voire amendés.

Comme l’ont déjà noté certains, la présentation du contrat met en avant les grandes étendues des zones peu urbanisées du bassin versant mais fait l’impasse sur la frange littorale du Bassin, de loin la plus urbanisée et imperméabilisée.

Or si le SIBA ne représente que 22 % de la superficie du bassin versant, comme d’aucuns l’ont fait remarquer, il abrite 65 % de sa population, massée principalement sur le littoral. La pollution générée par ces zones fortement urbanisées constitue le premier enjeu pour la qualité des eaux du Bassin, et l’artificialisation de ces zones l’a rendu éminemment critique : ainsi la saturation du réseau d’eaux usées par les eaux de pluie et de ruissellement lors de l’hiver 2023-2024, avec les conséquences dramatiques que l’on sait, s’est produite au sein de ces zones artificialisées, le plus souvent à l’écart des lits des principaux tributaires.

La densité et l’efficacité du réseau de drainage en milieu urbain ont été mises à mal par la pression d’une urbanisation galopante et leur faiblesse actuelle ne pourrajamais être compensée par les seuls efforts de régulation consentis dans les zones amont. La capacité d’infiltration du sol a été largement surestimée et le reste encore : la connaissance de la nappe s’appuie aujourd’hui sur le rapport MOHYS qui a pris (p 18) une référence hautes eaux sous-évaluée. Sur plusieurs points du littoral on constate toujours des suppressions de fossés et de nouvelles imperméabilisations. Cette situation, qui est pourtant la cause première des plus graves problèmes rencontrés, est complètement ignorée dans la présentation du contexte qui, pour ce qui est des pressions des zones urbaines des différents bassins versants, ne mentionne curieusement que la vallée de la Leyre. Le document mentionne bien que les pressions se concentrent sur les zones aval, en lien avec la densification de l’urbanisation, mais il indique à tort que le réseau hydrographique y demeure fonctionnel, alors que ses dysfonctionnements sont réels, fréquents, et documentés. La présentation ainsi faite incite à penser que tous les problèmes viendraient de l’amont, alors qu’ils viennent majoritairement du littoral lui-même ; cela n’est vraiment pas loyal pour les collectivités amont qui, de surcroît, sont pour la plupart déjà engagées dans des démarches vertueuses.

Une présentation impartiale et équitable du contexte mérite que de telles précisions, qui sont loin d’être mineures, soient apportées.

Bien évidemment, l’atteinte des objectifs, comme celui de prévenir les débordements des eaux usées, et la réponse aux axes majeurs des documents de référence, comme la limitation de l’imperméabilisation nouvelle des sols et le ruissellement pluvial et la désimperméabilisation de l’existant, ne pourra être possible que si l’on traite en priorité et en profondeur les zones où ces problèmes sont le plus prégnants, à savoir la frange littorale. Le problème de cette zone n’ayant pas été évoqué dans le contexte, on est en droit de se poser des questions sur sa prise en compte. La liste des actions prévisionnelles n’est guère éclairante car, alors que les actions des zones amont sont décrites dans le détail, le SIBA ne fournit que des enveloppes globales, sans aucune description des actions prévues ; et l’action la plus importante annoncée, une station d’épuration supplémentaire alors que les existantes suffisent largement à traiter les effluents de la population, est sans aucun lien avec les objectifs affichés.

Le comité de pilotage du contrat, chargé entre autres d’assurer la cohérence des actions sur le territoire couvert par le Contrat, ne manquera pas, du moins l’espérons nous, de faire évoluer ce contrat vers une meilleure prise en compte de tous les aspects de sa problématique et vers une présentation des actions plus harmonisée et homogène dans son niveau de détail.

En outre, l’efficacité et la crédibilité de la démarche reposent sur un pilotage impartial et des indicateurs objectifs établis par une tierce partie, garanties que le contrat ne présente pas aujourd’hui et ce point doit également être corrigé.

Enfin, ayons l’honnêteté d’être objectifs : s’il est sûr que le changement climatique ne pourra qu’accentuer la fragilité de notre territoire, il est trop souvent présenté comme le premier fautif ; reconnaissons tous ensemble que cette fragilité est d’abord due aux actions que nous y avons menées depuis des décennies et que les actions que nous planifions maintenant sont avant tout destinées à réparer les erreurs passées.

——————

Ce contenu a été publié dans Lettres. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire